Voici l’histoire de Hilde et Katleen. Toutes deux sont malades. Hilde a un cancer et Katleen a une sclérodermie. Chacune est confrontée à sa propre maladie et chacune avec sa propre histoire. On ne peut pas les mettre dans le même panier, les interchanger ou les mélanger… Être malade est en soi assez complexe.
Il suffit à Hilde de mettre (ou d’enlever) sa casquette de chimio pour que tout le monde sache qu’elle a un cancer. Son tableau clinique et l’évolution de la maladie peuvent être résumés en des termes bien connus : échographie, mammographie, biopsie, tumeur avec métastases, chimiothérapie, perte de cheveux, amputation, radiothérapie, chimio-cerveau, rééducation… De temps à autre, Hilde porte le symbole international de sa maladie, le ruban rose, pour rendre visible ce qui, à terme, deviendra invisible et aussi par sympathie pour les autres personnes atteintes du cancer du sein, “forts ensemble”, vous connaissez bien sûr…
Pour Hilde et les autres malades du cancer, un grand nombre d’initiatives sont prises par plusieurs organisations, et à juste titre ! Le cancer est un diagnostic terrible à recevoir, une lourde épreuve à subir à cause des traitements. Un verdict presque insupportable à vivre parce que les cellules cancéreuses errantes peuvent un jour, tôt ou tard ou peut-être jamais, commencer à se nicher dans l’une ou l’autre partie du corps.
L’accompagnement des malades du cancer est important. Hilde est bien entourée et de cette façon, tout semble un peu plus supportable. Comme sa maladie est bien connue, elle peut compter sur beaucoup de compréhension et de sympathie.
Katleen est atteinte d’une maladie peu connue, la sclérodermie. La maladie n’est pas immédiatement visible pour celles et ceux qui ne la connaissent pas. C’est une maladie à l’évolution erratique et aux symptômes divers, une maladie irréversible et incurable. La sclérodermie est aussi grave que le cancer, mais elle est bien moins visible et bien moins comprise.
Connaissez-vous les caractéristiques spécifiques de la sclérodermie ? Connaissez-vous les traitements possibles ? Connaissez-vous les joies et les peines d’un corps sclérodermique ? Connaissez-vous la couleur du ruban qui symbolise la maladie ? Non ? Hilde ne le savait pas non plus avant de rencontrer Katleen, il y a des années. Ce n’est pas une honte, même si cela aurait été plus facile si elles s’étaient connues plus tôt.
Des mesures sont rarement prises en faveur des personnes atteintes de la même maladie que Katleen, qui a alors créé l’association Sclero’ken vzw. Peu importe l’énergie qu’il lui faut pour passer une journée ordinaire et du moins supportable, elle organise des réunions pour les personnes atteintes de la même maladie, se rend à des congrès, mène des campagnes d’information, et se fait même entendre de temps en temps dans une interview ou dans un article, et à juste titre ! C’est un diagnostic terrible à recevoir, une lourde épreuve à subir les traitements, un verdict presque insupportable à vivre, car la sclérose peut frapper à tout moment et causer des dommages permanents dans l’une ou l’autre partie du corps.
Katleen fait bien plus que simplement épingler un ruban de temps en temps et elle ne le fait pas par pure sympathie, mais par pure nécessité pour les personnes atteintes de la maladie et qui ont rarement l’occasion de s’exprimer, et encore moins d’être entendues ou vues.
Katleen essaie régulièrement de capter l’attention sur sa maladie, comme elle l’a fait récemment dans un article pour Fokus Online. Comme elle était fière que le journaliste s’intéresse sincèrement à son histoire. Comme elle a été déçue lorsque l’article est enfin paru ! Au-dessus de l’article sur la sclérodermie de Katleen, une photo d’une femme inconnue portant une casquette typée que l’on porte pendant la chimio, à la place de la photo qu’elle avait transmise à la demande du journaliste et qui donnait un vrai visage à la sclérodermie. Pour certain.e.s, il peut s’agir d’un détail, mais cette confusion nous laisse perplexes. Sous la photo d’une femme portant une casquette « typée chimio », on s’attend à l’histoire d’une malade du cancer. Cette image ne correspond pas à Katleen, ni à sa maladie, ni à l’histoire qu’elle raconte.
En ne publiant pas sa photo, le journal rejette immédiatement son “être” tout entier. Dans ce cas, en tant que journaliste, maquettiste et rédacteur en chef, vous n’avez manifestement pas compris le message, vous utilisez les témoignages de Katleen, de Hilde et de tous les autres comme un simple gribouillage dans votre journal. Elles, sont bien plus que cela !. Après une interview si exhaustive, Katleen espérait bien plus ! Elle ne se contente pas de raconter son histoire, son objectif va plus loin.
L’article est donc devenu une occasion douloureusement manquée pour rendre justice à Katleen et à ses efforts pour faire connaître sa maladie encore inconnue. Grosse erreur, car c’est toutes les personnes atteintes d’une maladie qui sont également trompées. Si elles collaborent à une publication ou à une interview, les patientes comme Katleen attendent une traduction correcte de ses pensées en mots. Honte à vous, Fokus Online ! Mais … Katleen et Hilde ne restent pas fâchées et tristes très longtemps, la vie est bien trop courte pour cela. Elles y réfléchissent comme à tous les revers qu’elles vivent et terminent, comme toujours, sur une note positive.
Katleen et Hilde connaissent les soucis, les craintes et la tristesse de l’autre, elles se soutiennent mutuellement et chérissent les “petits bonheurs” de chaque jour. Quelle que soit la mesure dans laquelle elles se reconnaissent l’une dans l’autre et quel que soit le soutien mutuel, elles connaissent les particularités de la maladie de l’autre et respectent les différences.
« Nous ne pouvons pas être mises dans le même panier, échangées ou mélangées. Nous sommes toutes deux malades “différemment”, l’une peut guérir un jour, l’autre plus jamais. Mais nous vivons toutes les deux maintenant, et nous aimons vivre ! Nous sommes très heureuses de pouvoir encore célébrer les petites et les grandes choses de la vie, et surtout de pouvoir signifier quelque chose pour les autres, car c’est ce dont il s’agit au bout du compte. Un peu de compréhension et de reconnaissance supplémentaires aident vraiment. Nous attendons également cette reconnaissance de la part du monde extérieur et des médias. Sera-t-il possible d’y parvenir, pour la sclérodermie comme pour le cancer ? Nous continuerons à y travailler et nous l’espérons. »
Ce texte a été publié pour la première fois sur Facebook (27 juin 2021) par Katleen Polfliet et Hilde De Vleeschouwer. Avec leur permission, nous le partageons avec vous.
L’article en ligne de FOKUS a été publié sans la photo du patient cancéreux choisie à tort. Lisez l’interview (en néerlandais) complète de Katleen ici.
Testez vos connaissances sur la sclérodermie à l’aide d’un petit quiz !
Pour en savoir plus sur la sclérodermie, consultez le site Web de l’Association des Patients Sclérodermiques de Belgique (FR) ou de Sclero’ken (NDL).